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2° DES CHIMÈRES FOSSILES.

L'étude comparative et détaillée de toutes les mâchoires de Chimères fossiles que j'ai eu l'occasion d'examiner, m'a convaincu que l'on ne saurait les réunir aux genres vivans de cette famille. Sir Philipp Egerton, qui le premier a reconnu la nécessité de les distinguer génériquement, les divise en deux groupes, dont l'un comprend les grandes espèces á mâchoire large, d'un tissu grossier, et l'autre les espèces de petite taille, de forme plus ramassée et de structure plus dense. Il propose d'appeler Ischyodon le premier de ces genres, qu'il caractérise par le grand développement des tubercules de trituration de la mâchoire inférieure, qui sont séparés les uns des autres, et dont celui du milieu est surtout large. La partie de la dent qui se trouve en avant du tubercule ne se rétrécit pas vers sa base. Dans le second groupe, auquel sir Philipp Egerton donne le nom de Ganodus, les tubercules sont allongés, rapprochés et réunis en une seule protubérance recouverte d'une lame osseuse; ils sont placés très en arrière et tellement obliques, qu'ils sont réellement parallèles á la partie postérieure du bord dentaire. La plus forte épaisseur de la mâchoire est en avant du tubercule, mais elle diminue vers la base. La mâchoire supérieure de ce genre ressemble beaucoup á celle du genre Callorhynchus; seulement sa surface externe au lieu d’être entièrement concave n'offre qu'un profond sillon le long du bord extérieur et est du reste convexe.

Un autre caractère très-remarquable qui distingue ces genres, consiste dans la présence d'une lame striée longitudinalement á la face externe du bord dentaire des deux mâchoires chez les grandes espèces. Chez les petites espèces, cette lame est remplacée par un enduit émaillé très-lisse, semblable á la croûte d'émail des écailles de Ganoides. Mais, comme le fait remarquer sir Philipp lui-même, quoique ces divisions paraissent fondées sur des caractères organiques, il n'est pas possible d'affirmer maintenant que toutes les espèces qu'il range dans l'un ou l'autre de ces genres, possèdent tous les caractères qu'il leur a assignés d’après les exemplaires les mieux conservés.

Tout en reconnaissant la nécessité de séparer les espèces fossiles des vivantes, et en admettant même la convenance de diviser les premières en plusieurs genres, je me bornerai pour le moment á décrire provisoirement les espèces fossiles connues sous le nom de Chimaera, en conservant cependant les noms proposés par sir Philipp Egerton comme sous-genres, qu'il faudra ériger en genres distincts, dès qu'on aura les moyens d'établir complètement leurs caractères. J'ajouterai á ces deux groupes une troisième section comprenant quelques espèces d’un aspect particulier, dont le Ch. Mantellii peut être envisagé comme le type,qui se distingue par la pointe allongée de l'extrémité antérieure de la mâchoire inférieure, et par la disposition des stries d'accroissement de sa face inférieure. Je propose pour ce groupe le nom de Psittacodon.